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Les garnitures récentes et anciennes
DIFFÉRENCES ENTRES LES GARNITURES EN CRIN PIQUE A L'ANCIENNE ET LES GARNITURES EN MOUSSE
L'histoire du siège est liée à celle de la décoration intérieure, mais également à l'évolution des techniques elle même partie intégrante des professionnels et donc des organisations professionnelles. Ainsi l'artisanat du moyen age et de la Renaissance va se transformer dès le XVIIe siècle à Paris pour créer les Faubourgs et les corporations des artisans ébénistes et menuisiers en siège (utilisant l'estampille). A la révolution, les corporations seront dissoutes. Les années 1823/25 verront apparaître les ressorts ((appelés élastiques), puis la mousse (latex, bultex...)
Nous allons ici essayer de définir les différentes garnitures et techniques, qu'elles soient dites "anciennes" ou "modernes". Elles se caractérisent toutes par la même recherches : esthétisme et confort. Ensuite interviennent des considérations plus basiques comme la longévité (pour la garniture en crin) ou les couts de fabrication (pour la garniture en mousse).
Evolution de la garniture à travers les styles :
(découvrez notre galerie des styles)
L'évolution va se faire progressivement mais dès l'antiquité l'on retrouve des traces de garnissage sur des sièges égyptiens. Dès cette époque les sièges étaient garnis de sangles destinées à recevoir un coussin. Il faut attendre la Renaissance pour voir réapparaitre des sièges transportables pour lesquels est faite une recherche de confort. Mais ce confort est relatif car le fond est en bois garnis d'un coussin, donc beaucoup moins souple que des sangles.
Dès le XVIeme siècle la garniture en pelote est utilisée en Italie mais elle n'apparaît en France que sous Louis XIII et se poursuit sous Louis XIV. C'est à cette époque qu'elle gagne en épaisseur et s'arrondit.
Début du XVIIIe siècle la garniture évolue. Sous la Régence et Louis XV les assises se composent de gros bourrelets roulés autour de l'assise ce qui forme une sorte de cuvette que l'on garnis de crin végétal ou animal ou de laine... Les garnitures sont très arrondies. C'est le début des cuvettes à proprement parlé bien qu'elles n'aient pas tout à fait le même usage qu'aujourd'hui mais elles servent déjà à retenir les coussins sur les bergères.
Avec l'arrivée du mobilier Louis XVI les garnitures prenent un aspect plus ferme, plus net, les contours sont mieux définis. Les tapissiers commencent à utiliser des méthodes nouvelles en emballant le crin dans de la toile, ce qui les amènent à piquer l'ensemble pour assurer un bon maintien. Sous le Directoire et l'Empire les garnitures sont très élaborées et très fines. Les tapissiers s'ingénient à réaliser de nombreux piquages très fins. La garniture gagne en hauteur ce qui oblige le tapissier à rajouter des taquets pour la maintenir (morceau de bois placé sur le bas du dossier sous la garniture).
Mais le nombre des points allant croissant, les garnitures deviennent de plus en plus ferme et de plus en plus inconfortable. Heureusement sous la Restauration un élément va révolutionner l'art de la garniture dès le second Empire : c'est l'élastique. Il offre un nouveau confort qui va évoluer très rapidement. Les tapissiers vont utiliser ces élastiques pour composer des assises différentes les unes des autres. L'élastique va évoluer vers le ressort et les anglais inventeront le guindage suspendu (plus souple pour les fauteuils clubs par exemple).
De nos jours la mousse est un élément qui bouleverse le métier de tapissier. L'évolution continue et elle remplace le crin et parfois même les ressorts.
Les différentes garnitures :
la garniture d'un siège se concoit différemment selon son style, sa forme ou encore son ancienneté. Il est évident également que des considérations esthétiques doivent intervenir car un siège est souvent destiné (en plus de son usage premier : s'assoir) à venir apporter une touche supplémentaire dans la décoration d'une habitation.
La garniture en crin se décompose en plusieurs sortes de garnitures destinée à couvrir les différentes parties d'un siège. Mais un même siège peut recevoir plusieurs forme de garniture, comme par exemple une bergère qui se compose d'une cuvette sur l'assise qui va recevoir un coussin, puis un dossier à garniture en plein et des joues garnies à pelote.
La pelote :
C'est la garniture la plus simple : une petite quantité de crin est enfermée dans une toile. Au centre elle a une épaisseur de 3 à 5 cm. Elle est employé pour des sièges bon marché ou pour des travaux ne demandant pas une garniture élaborée.
Chaise dont le cannage a été remplacé par une pelote. Pour voir l'ensemble du reportage, cliquez ici
La garniture en plein :
Pour des assises plus larges et plus épaisses, il faut ajouterun certain confort par l'adjonction de ressorts qui toujours dans le but de respecter l'aspect d'époque, devront se faire le plus discret possible. C'est une masse de crin rin dont l'épaisseur dépend du style de l'assise. variable de 1 à 8cm. Le crin est maintenu par des points qui lui permettront de ne pas s'affaisser. Plus le nombre de points de piquage est important plus la garniture sera solide.
On distinguera :
- la garniture en plein piquée sans ressorts avant 1825
- la garniture en plein piquée avec ressorts après 1825
N'oubliez pas les sièges anciens ont une histoire et il n'est pas rare de trouver une restauration ancienne qui intégre des ressorts sur un siège qui n'en possèdait pas lors de sa construction !
La garniture en cuvette :
Elle présente un bourrelet partant en fuite sur l'arrière. Pour une assise la cuvette permet de retenir un coussin, pour un dossier dans une cuvette en forme de couronne l'on met du crin que l'on recouvre d'une toile blanche; cela assure un dossier bien ferme aux lignes marquées.
La garniture capitonnée :
Plus décorative que confortable. elle est composée d'une garniture en cuvette sur laquelle l'on fixe du crin. Des points de serrage réguliers maintiennent une toile qui emprisonne le crin . Cela forme des creux et des proéminences. La forme des capitons (leur taille, leur volume, leur nombre) ets à définir avant réalisation selon la taille du support afin que cela soit régulier et homogène et surtout symétrique.(relation entre la largeur, la hauteur, la longueur et l'épaisseur).
La coupe transversale d'un siège avec une garniture en crin piqué
1 Toile Forte, 2 Le crin végétal, 3 Toile embourrure, 4 Elancrin Roux, 5 Toile Blanche, 6 tissus, 7 Clous de Tapissier, 8 ressorts de tapissier, 9 Sangle de tapissier
Les étapes du garnissage classique
Sur ce fauteuil Louis XVI, il sera réalisé une garniture en plein pour l'assise, ainsi qu'une couronne pour le dossier.
Ressorts 5 tours galvanisés siège
Mise en crin
Dossier en couronne
La piqûre (petit couche d'Elancrin)
La mise en blanc et ouate
Jaconas
Les garnitures modernes
Les matériaux nouveaux ont permis une évolution des styles, des formes, du revêtement des sièges mais aussi ont radicalement changé la forme et le design des sièges qui ont pu être modifiés grâce à ces produits qui permettent d'obtenir des lignes bien différentes de celles que nous avons connues. L'évolution dans les sièges, qui est due tout particulièrement à l'arrivée sur le marché de matériaux nouveaux comme les mousses.
Sur le plan industriel le prix de revient peut être considérablement abaissé après l'établissement de gabarits permettant d'exécuter une série. En outre le professionnel n'a plus à chercher les ressorts les mieux appropriés au guindage et le nombre de points pour le piquage de la garniture.
Par contre les problèmes que l'on rencontre se situent au niveau de la couverture et de la recherche de la bonne valeur des densités pour obtenir le meilleur confort et une durée de vie inferieure des assises qui supportent moins facilement une utilisation que les matériaux classiques qui traditionnellement sont fait pour durer plusieurs années.
Il est évident que parmi tous ces produits, bon nombre ont déjà fait leurs preuves et il est possible de marier les matériaux modernes et les matériaux classiques. Rien ne s'oppose à tirer le meilleur rendement des uns et des autres.Pour autant un siège ancien ne serait être restauré avec des matériaux modernes sous peine de voir sa valeur réduite de façon rédhibitoire.
Pamis les ganitures utilisées ont peut distinguer :
- le latex naturel ou non
- la mousse
Le Latex
D’origine naturelle (sève d’hévéa) ou synthétique, le latex est résistant et pratiquement indéformable d’une densité allant de 54Kg/m3 à 83Kg/m3, offrant un confort progressif, souple à l’accueil ferme en profondeur.
Le latex est perforé ou alvéolé et doté de zones de conforts différenciés allant de 3 à 7 zones.Au moment de réaliser la garniture en mousse, le tapissier doit prévoir d'utiliser les bons élèments en fonction de la fermeté nécessaire sur les différentes parties du siège. Il a recours aux diverses densités car les parties à recouvrir sont indépendantes ce qui lui permet de choisir parmi les différentes densités et épaisseur selon l'usage (dossier, assise, manchette...). L’assise d’un fauteuil supporte environ 75% du poids du corps, le dossier absorbe 8% du corps, tandis que 17% du corps est déchargé sur le sol par l’intermédiaire des pieds. L’accoudoir doit supporter le poids du corps à 40%.
Le fond du siège nécessite donc une mousse assez ferme puisqu'il reçoit la masse du corps ; le dossier demande plus de souplesse pour être agréable ; la manchette aura un dessus souple mais avec une âme (c'est-à-dire l'intérieur) ferme, car les accotoirs doivent être résistant. De même, pour le siège à coussins, la mousse du coussin du fond doit être plus ferme que pour celui du dossier. Pour augmenter le confort il est possible de coller une couche de mousse très souple en surface. Ces mousses doivent être protégées de l'air et de la lumière mais sans être enveloppées dans une étoffe imperméable à l'air afin de respirer. En effet la mousse au contact de l'air s'oxyde en noircissant et la lumière détruit la mousse et la dessèche. C'est pourquoi on utilise une enveloppe de toile noire. En outre, la toile employée ne doit pas adhérer à la mousse et ne pas plisser pour ne pas la déformer .
Coupe transversale d'une assise avec une mousse de latex en garniture
Les mousses latex sont sensibles à la transpiration humaine qui provoque une moisissure. Il faut les laisser respirer et ne jamais les envelopper dans un revêtement étanche à l'air (à moins de prévoir des trous d'aération).
Les mousses synthétiques
La mousse polyuréthane est un matériau compressible qui est employé dans la fabrication d’assises et de dossiers de canapés pour des notions de confort (souplesse agréable, fermeté) et permet de protéger
les bordures des meubles à des fins de sécurité comme de longévité La mousse de polyuréthane est un produit dérivé du pétrole. Cette mousse a une forme différente de la précédente : elle se présente en pains de 200 x 300 cm d'une épaisseur de 80 à 110 cm selon densité. Ces mousses se signalent par des couleurs variées correspondant des qualités ou des densités différente On détermine la qualité de la mousse par sa compression et sa densité ; celle-ci est variable selon que la croûte est comprise ou non.Nous pouvons identifier les mousses POLYESTER et POLYURETHANNE.
Le procédé de fabrication est le même, seules les caractéristiques souhaitées par le fabricant
(densité, élasticité, résistance) détermine le dosage de la mixture.- La mousse polyester se distingue par une structure alvéolaire très fine à circulation d’air médiocre.
- La mousse polyuréthanne est plus spongieuse avec des alvéoles plus grandes permettant une meilleure circulation d’air.
La garniture moderme
La mousse est facilement transformable ; au stade artisanal, l'équipement peut être relativement réduit. La garniture peut se faire sous différentes formes :
La garniture moulée
Sa fixation sur la ceinture ne présente pas de difficultés puisqu'elle a la forme précise du siège sur lequel elle doit reposer. Cette mousse est souvent en latex mais peut se concevoir aussi en polyéther ou autre.
La garniture moulée renforcée
L'inconvénient des garnitures moulées est de ne pas avoir de résistance à l'emplacement du bourrelet surtout lorsque l'étoffe n'est pas souple et se place mal. On y remédie en utilisant un profil en caoutchouc ferme ou de polyéther aggloméré qui offre une résistance et une ligne beaucoup plus nette. Il est nécessaire d'entailler la garniture moulée de la valeur du profilé. Le profil prenant la place de ce qui devient la chute sera collé à la garniture. Le raccordement peut être maintenu par une toile collée sur le joint
la garniture façonnée
On utilise les profilés sont des morceaux de mousse de très haute densité (150 à 250 kg/m3) agglomérée en forme de « boudin » qui sont utilisés pour remplacer le bourrelet de crin pour le garnissage des sièges: lors d’une garniture en crin, la forme est donnée par le piquage des bords du crin de façon à créer un bourrelet. Il existe des profils d’assise et de dossier, de différentes tailles selon la nature et le style du siège.
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Conclusion
En conclusion, le choix de la garniture, mousse ou crin, dépend de plusieurs critères. Le siège lui même, bien sur. Il serait criminel (le mot n'est pas trop fort !) de garnir un fauteuil du XVIII avec de la mousse. A contrario, est-ce raisonnable de poser une garniture en crin piquée sur un fut (ossature, bois de siège) de mauvaise qualité ou très moderne. Cela reste possible mais parfois délicat car lorsqu'un siège est fabriqué il l'est en fonctionné de sa future garniture. S'il doit recevoir de la mousse, il n'y a pas de feuillure (emplacement ou l'on pose les semences (clous) pour maintenir les toiles) puisque la mousse est collée. Quelle difficulté alors pour le tapissier de réussir à poser les différents éléments de garniture à des endroits non pour prévus pour cela !
Le coût de réalisation est aussi à prendre en compte évidemment. La mousse est moins onéreuse. Les coûts de la matière d'oeuvre (mousse) sont plus chers (que du crin) mais le temps de mains d'oeuvre étant diminué la facture totale s'en voit baissée; cependant une garniture en mousse à une durée de vie bien inférieure à une garniture en crin (5 à 10 ans pour la mousse, 25 à 50 ans pour le crin); la encore, du crin sur un fut moderne : le fut risque de s'abîmer avant la garniture !!!
En bref, se poser les bonnes questions :
1) le siège (ancien récent ?)
2) son utilisation (intensive, moyenne, décoration),
3) le budget
4)..... m'appeler
est-ce un siège ancien ? si oui, il est préférable de le refaire à l'identique, c'est à dire en crin (souvent jusqu'aux années 1940/50). Si le siège est ancien mais de moyenne ou mauvaise qualité, et que l'on répugne à envisager la mousse, il est possible d'utiliser une technique mixte comme le profilé par exemple. L'on peut également bien sur refaire une garniture en crin piquée, se demander alors si cela en vaut le cout au vu de l'utilisation du siège, de sa valeur...
Je vous encourage à en parler avec votre tapissier qui saura vous orienter vers les bons choix. Demandez des photos des différentes étapes et faites vous expliquer ces choix à travers un compte rendu de restauration, le professionnel sera ravi de vous renseigner, tant il est vrai que les tapissiers sont souvent passionnés et avides de parler de leur passion : le siège !